Si vous possédez un bâtiment et le terrain adjacent que vous utilisez dans votre entre-prise, ou comme bien locatif, vous pouvez amortir le coût du bâtiment aux fins de l'impôt sur le revenu. L'amortissement fiscal est appelé « déduction pour amortissement » (DPA), et le solde de la catégorie de biens à la fin de chaque année est appelé « fraction non amortie du coût en capital » (FNACC).
Si vous vendez le bâtiment pour un prix inférieur au solde de la FNACC de la catégo-rie à laquelle il appartient, vous aurez une perte finale, qui pourra normalement être déduite en totalité dans le calcul de votre revenu.
Si vous vendez le terrain pour un prix supé-rieur à son prix de base rajusté pour vous, la moitié du gain en capital qui en résultera sera incluse dans votre revenu à titre de gain en capital imposable (à moins que vous exploi-tiez une entreprise de vente de terrains ou que vous l'ayez acheté dans l'intention de le reven-dre, auquel cas le montant total du gain sera inclus dans le revenu de votre entreprise).
Par conséquent, si vous vendez le bâtiment et le terrain de la manière décrite ci-dessus, à première vue, vous aurez une perte entière-ment déductible sur le bâtiment mais un gain sur le terrain dont seulement la moitié serait incluse dans le revenu.
Malheureusement, la LIR comporte une règle de réaffectation dans de telles circonstances. En général, vous devez réaffecter au bâtiment une partie du produit de la vente du terrain; en effet, une portion du produit de la vente du terrain n'excédant pas le gain réalisé sur le terrain doit être réaffectée au bâtiment en vue de réduire le montant de la perte finale.
Exemple
Vous vendez un bâtiment et un terrain utilisés dans votre entreprise. Le prix de base rajusté du terrain pour vous est de 300 000 $ et la FNACC de la catégorie d'amortissement à laquelle appartient le bâtiment (seul bien de la catégorie) est de 150 000 $. Le prix de vente total est de 500 000 $, soit 400 000 $ pour le terrain et 100 000 $ pour le bâtiment.
Au départ, vous calculeriez un gain en capital de 100 000 $ sur le terrain et une perte finale de 50 000 $ sur le bâtiment. Cependant, en vertu de la règle de réaffec-tation, un montant de 50 000 $ sera trans-féré du produit de la vente du terrain au bâtiment.
Par conséquent, le produit de la vente du terrain sera ramené à 350 000 $, de sorte que vous aurez un gain en capital de 50 000 $ et un gain en capital imposable de 25 000 $. Le produit de la vente du bâtiment sera majoré à 150 000 $, pour une perte finale nulle.
La règle de réaffectation ne s'applique pas s'il n'y a pas de gain initial sur le terrain, ou s'il n'y a pas de perte finale initiale sur le bâti-ment.
QU'EN DISENT LES TRIBUNAUX?
La Cour suprême confirme le principe du rattachement pour les opérations de couverture
Dans l'affaire MacDonald, la Cour suprême du Canada (CSC) a confirmé ce qu'il était convenu d'appeler le « principe du rattache-ment » applicable à certains contrats dérivés. En vertu de ce principe, essentiellement, s'il y a un lien suffisant entre un contrat dérivé et la valeur d'un élément d'actif, d'un élément de passif ou d'une opération pour que le dérivé soit effectivement considéré comme une opé-ration de « couverture », les gains ou les pertes sur le dérivé aux fins de l'impôt sur le revenu acquièrent la qualité de l'élément d'actif, l'élément de passif ou l'opération faisant l'objet de la couverture.
MacDonald détenait des actions de la Banque de Nouvelle-Écosse. Il avait obtenu une ligne de crédit importante auprès de la Banque TD, en affectant les actions en garantie de la ligne de crédit. MacDonald avait conclu en outre un « contrat à terme de gré à gré » avec Valeurs mobilières TD, société faisant partie du même groupe de la Banque TD. En vertu du contrat à terme, MacDonald devait effec-tuer des paiements à Valeurs mobilières TD si la valeur des actions augmentait au-delà du prix à terme du contrat, tandis que Valeurs mobilières TD devait le payer si la valeur des actions baissait en-deçà du prix à terme. Sur la durée de trois ans, la valeur des actions a augmenté, et MacDonald a versé environ 10 M$ à Valeur mobilières TD en vertu du contrat à terme.
MacDonald était d'avis que le contrat à terme avait un caractère spéculatif, de telle sorte que les 10 M$ constituaient une perte d'entreprise. S'il s'agissait d'une perte d'entre-prise, celle-ci était entièrement déductible de ses revenus d'autres sources. L'Agence du revenu du Canada (ARC), qui n'était pas d'accord, faisait valoir, pour sa part, que le contrat à terme servait de couverture de la valeur des actions. Comme les actions con-stituaient une immobilisation pour MacDonald, l'ARC a établi une cotisation à l'égard des 10 M$ à titre de perte en capital. La moitié seulement de la perte en capital était déduc-tible, et cela uniquement des gains en capital imposables de MacDonald.
La Cour canadienne de l'impôt a entériné la position de MacDonald. En appel, toutefois, la Cour d'appel fédérale a maintenu la cotisation de l'ARC, en faisant valoir qu'il y avait rattachement suffisant entre le contrat à terme et les actions.
Fait exceptionnel, la CSC a donné à MacDonald l'autorisation d'interjeter appel (première cause technique en matière d'impôt sur le revenu que la CSC a accepté d'entendre depuis de nombreuses années). Au bout du compte, cependant, la CSC a maintenu la décision de la Cour d'appel, et a conclu ce qui suit : « Lorsqu’on l’examine dans le contexte global qui lui est propre, le contrat à terme de gré à gré avait manifestement pour objet de se prémunir contre les fluctuations du prix du marché auxquelles étaient exposées les actions de la Banque de Nouvelle-Écosse détenues par M. » Comme les actions con-stituaient une immobilisation pour MacDonald, la perte sur le contrat à terme était une perte en capital, non une perte d'entreprise déductible.
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